L’épineuse question de la tonte et du rasage masculin en tour du monde

Publié par Audesou, le 10 juin 2012 à 03:10

En vérité, je vous le dis, dans la vie, il n’y a que deux types d’hommes :

  1. Les hommes imberbes, qui rêvent du jour où la pilosité de leur visage deviendra artistiquement exploitable.
  2. Les hommes poilus, qui rêvent du jour où leur peau restera douce pendant un peu plus de trois heures vingt.

Tous se demandent secrètement pourquoi la chaîne de l’évolution les a menés jusqu’ici.

Car oui, comme le dit le proverbe vieillot, L’herbe est toujours plus verte dans le pré du voisin. Quand ils se croisent dans un vestiaire, les membres de ces deux clans se regardent en chiens de faïence. Depuis des millénaires, pendant que les uns pestent contre ces centimètres carrés de peau désespérément nus, les autres luttent jour après jour et sans relâche contre l’envahisseur pileux.

Telle est la triste condition de l’homme du vingt-et-unième siècle.

Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas exactement du genre imberbe. C’est pourquoi derrière l’apparente légèreté qui se dégage de l’introduction de cet article se cache en fait parfois une réelle problématique qu’il ne faut pas négliger lorsque l’on part plusieurs mois en tour du monde avec pour tout équipement ce que l’on est capable de transporter sur son dos.

Quand certains globetrotteurs poilus ne se sépareraient pour rien au monde de leur blaireau favori, d’autres aventuriers choisissent purement et simplement d’abandonner la lutte. Christoph Rehage est probablement le meilleur représentant de ce mouvement.

Ne souhaitant tomber ni dans un extrême, ni dans l’autre, il m’a fallu voyager. Observer. Rechercher. Expérimenter. Me couper, aussi. Puis guérir. Et recommencer. Il m’a également fallu recueillir tard le soir des témoignages anonymes auprès d’hommes traumatisés par le nombre de lames en perpétuelle augmentation sur les rasoirs mécaniques. Jusqu’à avoir ouvert suffisamment de portes pour faire un choix éclairé.

À toi, l’homme moderne qui souhaite voyager autour du monde tout en conservant le contrôle sur tes poils — qu’ils peuplent ta tête, tes joues, ton cou, tes aisselles, tes parties intimes, ou d’autres régions farfelues — je livre ici le résultat de mes recherches.

Femmes et hommes de tous les horizons, sachez que vos contributions à cette enquête humanitaire sont les bienvenues !

Option 1 : l’homme sans lame

Partir esprit et sac libres, sans aucune lame à portée de main. Simple. Sobre. Cru.

C’est une option envisageable pour ceux qui comptent sur leur propre capacité à se débrouiller en cours de route, ou pour les hommes peu poilus. Par la force des choses, c’est également l’option que privilégiera celui qui décide de ne plus se raser. Certains racontent l’histoire de leur vie en travaillant le cuir, d’autres choisissent de le faire par l’intermédiaire de leur barbe. En ce sens, les poils deviennent des compagnons nobles, véritables conteurs des aventures vécues. Les décapiter serait cruel.

Cette option, je ne l’ai pas retenue longtemps. Sans même parler d’hygiène, le risque est trop important de voir fleurir dans la presse locale — après quelques semaines de voyage, une fois arrivés en Terre de Feu — des témoignages de gens pensant avoir aperçu Bigfoot, loin de ses terres habituelles.

Option suivante, donc.

Option 2 : le rasoir mécanique (types Mach 3 Turbo de Gillette ou sabre Dovo)

La seconde option, c’est d’emporter avec soi le traditionnel rasoir de sûreté.

Sans rentrer dans un débat du type « Rasage mécanique ou électrique : quels secrets pour un rasage parfait ? », un bon rasoir de sûreté rasera toujours de plus près qu’un rasoir électrique. Cela veut dire peau plus douce mais cela veut dire aussi plus de risques de coupures. Notez qu’avec de la pratique — et, de préférence, beaucoup de vigilance à certains endroits (hum...) — il est possible de se raser la totalité des zones du corps avec un rasoir de sûreté performant.

L’autre avantage certain du rasoir de sûreté, c’est qu’il ne tombera jamais en panne quand vous en aurez besoin.

Côté inconvénients, le principal, c’est qu’un rasoir de sûreté demande au minimum de l’eau en quantité suffisante : pour humidifier la peau, nettoyer les lames et se rincer. Ça n’est pas un problème lorsque l’on dispose d’une salle de bain, mais ça le devient lorsque l’on se trouve loin d’une source d’eau courante.

Le deuxième inconvénient, c’est que choisir le rasoir de sûreté, c’est un peu comme acheter un produit chez Apple. Une fois que vous avez le rasoir, il vous faut vous procurer des lames de rechange, une bombe de mousse/gel à raser, une lotion chauffante avant-rasage, une lotion hydratante après-rasage, un crayon de rasage pour les coupures, des piles pour alimenter le manche vibrant du rasoir, etc. Au fur et à mesure, cela fait du volume et du poids.

À ce stade, il est intéressant de noter que pour des raisons économiques, écologiques, ou tout simplement liées à la passion ou l’élégance, certains routards préfèreront opter pour un rasoir droit (ou sabre) plutôt que pour les classiques rasoirs de sûreté proposés par exemple par Gillette, Wilkinson ou Bic.

L’avantage de cette solution par rapport aux autres rasoirs mécaniques est qu’il devient inutile de se procurer de nouvelles lames et, qu’avec beaucoup d’entraînement, il est possible de se raser sans eau ou savon à barbe. Le rêve pour celui qui souhaite voyager tout en étant toujours rasé de près.

En revanche, il faut garder à l’esprit que le rasage au sabre demande une très grande dextérité et qu’il est nécessaire d’affûter très régulièrement la lame du rasoir sur du cuir pour en conserver les qualités. Il faut aussi garder à l’esprit qu’en phase d’apprentissage, le risque de blessure est franchement élevé. « Le prix de l’élégance », disent les passionnés. Ceci dit, passionnés ou pas, n’imaginez même pas vous raser autre chose que le crâne, la nuque ou le visage avec ce type de lames. Et s’il était besoin de le rappeler, ne tentez jamais d’introduire ce type de rasoirs dans la cabine d’un avion de ligne, sous peine de vous attirer de très gros ennuis.

Après avoir pesé le pour et le contre, c’est cette option que privilégie pour le moment Koonshu, qui, s’il n’est pas imberbe, n’est pas poilu non plus. Peu enthousiaste à l’idée de transporter une bombe de mousse sous pression dans son sac à cause des changements de température et des chocs qu’elle risque de subir lors du parcours, il partira probablement avec un rasoir de sûreté et quelques lames de rechange uniquement. Avec la pratique, et lorsque les poils du visages ne sont pas trop drus, il est largement envisageable de se raser à l’eau savonneuse. Voire à l’eau plate. Pour l’anecdote, par souci d’économie de volume et de poids, certains Marcheurs Ultra-Légers vont même jusqu’à se passer du manche (tout comme ils le font pour leur brosse à dents, d’ailleurs).

De mon côté, malgré ses attraits, je ne partirai probablement pas sur cette option. Quand on a les poils qui poussent vite et fort, le rasage mécanique est fastidieux lorsqu’il n’est pas effectué très régulièrement. Et je ne ressens pas l’envie d’être rasé de près lorsque je suis sur la route. Dans de bonnes conditions, se raser quotidiennement à blanc peut être un plaisir. En tour du monde, alors qu’on ne sait pas nécessairement en fin de soirée où l’on passera finalement la nuit, cela m’a tout l’air d’une contrainte inutile.

Option 3 : le rasoir électrique (type Aquagenic Sensotec HQ8890 de Philips)

Le rasoir électrique est aux antipodes du rasoir mécanique :

  • L’un peut couper, l’autre non.
  • L’un est bruyant, l’autre non.
  • L’un peut tomber en panne, l’autre non.
  • L’un demande de l’eau, l’autre non.
  • L’un demande de l’électricité, l’autre non.
  • L’un nécessite un changement régulier des lames, l’autre non.

Pas étonnant que l’on retrouve d’un côté les farouches défenseurs du rasage mécanique et de l’autre côté ceux du rasage électrique. Étrangement, je me suis toujours situé au centre, en utilisant indifféremment la technique de chacun des deux camps, selon l’humeur du jour.

En voyage, l’avantage d’un bon rasoir électrique, c’est qu’une fois chargé, il se suffit à lui-même. Pas besoin d’eau, de prise électrique, de mousses en tous genres. Juste le contact intime entre le rasoir et la peau.

L’inconvénient, c’est qu’il est bruyant, qu’il peut tomber en panne, et que, comme son homologue mécanique, il est loin d’être agréable de raser une barbe d’une semaine au rasoir électrique. Ah ! Et si l’idée vous venait de vouloir vous raser certaines parties du corps avec un rasoir électrique destiné au visage... oubliez. Tout simplement.

J’ai longtemps hésité à emporter mon rasoir électrique avec moi, sur La Piste Inconnue. Contrairement à un rasoir de sûreté, il m’aurait permis de me raser le visage sans disposer nécessairement d’une source d’eau, et son autonomie aurait suffit pour plusieurs rasages sans prise de courant à proximité. Pour autant, son manque de polyvalence (rasage de près et au niveau du visage uniquement) m’a jusqu’à présent dissuadé de lui faire parcourir le globe.

Au final, je pense plutôt partir sur la quatrième et dernière option.

Si vous optez de votre côté pour un rasoir électrique, veillez à jeter votre dévolu sur un produit parfaitement étanche (plus résistant et plus hygiénique car lavable sous l’eau) et sans fil (plus pratique).

Option 4 : la tondeuse électrique (type Bodygroom Pro TT2040 de Philips)

Pas franchement convaincu par les trois options précédentes, j’ai continué mon enquête jusqu’à ouvrir à nouveau la porte de chez Philips, qui propose depuis quelques mois sur le marché un concept intéressant de tondeuse électrique pour le corps, le Bodygroom Pro.

D’après la notice, le Bodygroom Pro « peut être utilisé pour couper ou raser les poils des zones du corps situées en dessous de la nuque ».

Sa particularité ? Étanche et sans fil, ce produit est 2 en 1 : l’un des côtés de la tondeuse dispose d’un sabot réglable en hauteur tandis que l’autre côté est un rasoir électrique adapté pour le corps.

La cible initiale de cette tondeuse est clairement une clientèle d’hommes métrosexuels, mais à y regarder de plus près, sa polyvalence est également bien adaptée pour certains backpackers.

Fatalement, sa tête de rasage ne peut concurrencer la qualité de la coupe d’un rasoir de sûreté, mais dans le cadre de son utilisation de base — à savoir la tonte ou le rasage des parties du corps sous la nuque — le Bodygroom Pro est un très bon produit. Beaucoup plus polyvalent qu’un rasoir électrique classique, et bien moins éprouvant psychologiquement qu’un rasoir mécanique lorsqu’il s’agit de s’attaquer à des zones sensibles comme les aisselles ou les parties intimes. Et c’est une bonne chose, car il est conçu pour cela.

Mais là où ce produit devient franchement intéressant, c’est que même si ces pratiques sont déconseillées par Philips, il est possible de le détourner de son utilisation de base.

Lorsqu’il est utilisé pour la tonte, le Bodygroom Pro ne vous permettra pas d’obtenir un look « barbe de trois jours », mais si le look « barbe de cinq jours » vous convient, alors il est totalement envisageable d’utiliser cette tondeuse au niveau du visage. Je vous déconseille en revanche d’utiliser la tête de rasage pour travailler votre barbe.

Toujours dans une optique de grand détournement — non encore testé au moment de l’écriture de ces mots —, je pense qu’en la poussant dans ses retranchements, il est envisageable d’utiliser cette tondeuse sur des cheveux. Elle risque de manquer de puissance en tentant de traverser des cheveux épais, et la petite largeur du sabot implique probablement de multiplier le nombre de passages, mais c’est quelque chose qui doit pouvoir se tenter.

En bref, pour les globetrotteurs qui, comme moi, n’ont que faire d’avoir les joues rasées de près, mais qui restent pourtant soucieux de ne pas laisser leur corps en friche lors de leurs pérégrinations, cette tondeuse regroupe tous les avantages du rasoir électrique classique et vient y rajouter la polyvalence, qui faisait cruellement défaut à ce dernier.

En guise de conclusion

Lorsque l’on prévoit de quitter le confort de sa salle de bain pour de longs mois, trouver la solution de rasage la plus adaptée est loin d’être évident. J’espère dans tous les cas que cette enquête pourra être utile à d’autres, par la suite.

Koonshu partira donc probablement un rasoir de sûreté dans le dos. Pour ma part, j’opterai sûrement pour le Bodygroom Pro. Pas sûr que celui-ci tienne tout au long du chemin, mais la meilleure façon de le savoir, c’est d’en faire l’expérience. En cas de casse ou de vol au cours de l’aventure, je pense me rabattre par défaut sur un rasoir mécanique, même si, comme évoqué plus tôt, cette solution n’est pas toujours la plus adaptée pour le globetrotteur velu.

Et vous, qu’auriez-vous choisi à notre place ?

Enfin, même si ce sujet n’a pas été abordé directement dans l’article, il est important de se rappeler qu’en tour du monde, les poils, surtout s’ils sont nombreux et épais, peuvent vous protéger du froid et du soleil. Si comme moi vous êtes capables d’attraper des coups de soleil en hiver sous la pluie (j’exagère à peine...) ou que vous êtes amateurs de nuits passées sous la belle étoile, n’hésitez pas à utiliser votre pilosité à votre avantage !

Déjà 2 traces de pas sur ce bout de piste :

1. ablo, le 19 février 2014 à 08:43

Le rasoir bodygroom rase t il bien le crâne ?

2. Audesou, le 19 février 2014 à 15:31

Hello ablo,

Il n’est pas conçu pour cela, et il faut s’armer de patience, mais pour l’avoir fait plusieurs fois depuis mon départ, oui, il est possible de se raser le crâne avec le Bodygroom Pro.

Bien à toi,

Vous aussi, laissez vos traces sur la piste...